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3 octobre 2011

Nous rendons visite aux Mumémistes.....

Sans titre 48

         Une petite tranche de mon métier......

En 1964, en riposte à l'invasion muleliste menée par les troupes du général rebelle Gaston Soumialot, de Boende au sud du fleuve congo et de Gemena dans l'Ubangi.

L'Armée nationale congolaise (nous), soutenus par des éléments étrangers (nous), nous sommes repartis à la reconquête de cette région, en direction de Stanleyville et du Kivu.

La progression se faisait en colonne; en premier lieu, un blindé léger de reconnaissance, souvent un Ferret, de 4,4 tonnes, de fabrication anglaise, relativement moderne (la version de base date de 1953), monté par deux hommes, un chauffeur, dans la tourelle, un mitrailleur équipé d'une trente-trente.

Ensuite, deux jeeps mitrailleuses en 30 aussi, puis une jeep avec un canon sans recul de 75 mm.

Viennent ensuite les camions non fermés, plateau équipé d'une double banquette sur laquelle sont assis une douzaine d'hommes dos à dos; des voltigeurs, dès que le véhicule s'arrête, sautent sur la route et se déploient en tirailleurs.

Chaque camion est autonome, c'est-à-dire qu'il a sa propre dotation en carburant, armes, munitions et rations; de telle manière qu’en cas de destruction ou d'incendie d‘un véhicule, la colonne est déforcée mais pas immobilisée.

En savane, la colonne est, autant que faire se peut, survolée par un avion léger qui signale d'éventuels obstacles sur la route, parfois une épave de véhicule ou un ou deux fûts de carburant (lorsque la rébellion était encore riche) auxquels une grenade Envergué tirée par les rebelles met le feu et arrête la progression.

C'est l'embuscade, la colonne est alors sous le feu des snipers.

En forêt, en plus des obstacles habituels, arbres abattus, ponts en bois brûlés, ponts en béton démolis à la pioche, épaves de véhicules, ponts Bellay "déplatelés", il y avait aussi les pièges à éléphants.

La route, sur une longueur de quatre mètres et sur toute sa largeur, est creusée sur deux mètres de profondeur.

Les parois sont absolument lisses et verticales et la terre a été évacuée par un petit sentier de forêt à 100 ou 200 mètres du piège.

Le trou est recouvert de tiges de bambous de feuilles de bananiers puis de terre de limonite, le tout soigneusement camouflé.

Le but est de faire choir le véhicule en tête de la progression au fond du piège.

C'est alors que les tireurs isolés, cachés dans la futaie entrent en action.

Embuscade typique.

Ce genre d'obstacle peut ralentir une progression durant plusieurs heures, voire plusieurs jours.

Lors de la reprise d'Elisabetha, à Kangala, juste après le passage à niveau du Decauville venant de Ngungu, ce genre de trou dit "à éléphant" nous a demandé deux jours de travail avant de pouvoir utiliser la route.

 

 

Lorsqu'une colonne en opération se trouvait bloquée, le Ferret s'arrêtait, les deux jeeps mitrailleuses prenaient position de chaque côté de la route afin de contrôler la végétation, les voltigeurs sautaient en bas de leurs camions, se déployaient de chaque côté pour débusquer les tireurs isolés et progresser vers l'obstacle.

La jeep-canon tirait un obus sur le barrage pour le détruire ou en tout cas l'ébranler afin de déclencher l'explosion de la charge s'il était piégé, ce qui n'était pas exceptionnel.

Ce processus de progression était théorique, la guerre est aussi la science de l'improvisation; on m'a dit que le poste de Ango dans l'Uélé était inaccessible car situé derrière deux bacs détruits.

C'est un commando de mercenaires espagnols( anciens des banderas) qui l'aurait libéré en se déplaçant à vélo.

L'eau avait un certaine importance pour les rebelles mulelistes ( leurs croyance affirmait que) qu'ils étaient : SIMBA (Lion en Kiswahili).

C'est de l'eau (du Tanganyika) que venaient leurs armes; c'est l'eau de Mulele qui les rendait invincible, c'est aussi en gouttes d'eau qu'étaient transformés les projectiles qui leur étaient destinés.

Ils devaient monter à l'attaque en scandant "maï! (eau) maï! mulele" ( à remarquer que depuis 1994 les éléments rebelles qui ont causé beaucoup de malheur au Kivu s'appellent aussi les "maï-maï") et surtout ne pas se retourner pour voir où étaient leurs copains; de cette manière ils ne voyaient pas ceux qui restaient sur le carreau.

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J'ai combattu plusieurs fois les mulélistes. Bandes hétéroclites, ivres de haine et d'alcool, parfois drogués,nous étions obliger de les supprimer jusqu'aux derniers.

" En juillet sur la Sangha nous sommes arrivés au début d'une digue, il y avait un arbre sur la route, à 300 mètres une masse de guerriers avec attributs et peintures de guerre. Ils se sont mis en marche, au petit trot, la lance haute, en scandant "maï! maï! maï Mulele!"; de notre côté, tout ce qui pouvait tirer était en action, chargeurs après chargeurs, nous voyions nos projectiles pénétrer dans les poitrines, mais la masse continuait à avancer inexorablement. Effrayant, cela semblait impossible à arrêter.

Faut savoir qu'un coup de lance ou de sagaie fait des ravages terribles, on peut être décapité, cela tranche les muscles, provoque des hémorragies incontrôlables et dans ce climat équatorial l'infection est inévitable. Et toujours ce rythme "maï ! maï ! " quatre-vingt mètres, puis soixante, puis quarante, brusquement, plus rien, les (quelques) survivants ont disparu dans la brousse laissant quarante ou cinquante morts ou moribonds sur la route. Nous ont là, on reste tremblant, mouillé de sueur, les jambes en coton, puis il faut progresser, achever les blessés, récupérer les armes, fouiller les cadavres pour trouver des documents, dégager la route, patauger dans le marais pour déloger d'éventuels rescapés. Une expérience dure, très dure, après laquelle vous n'êtes plus tout à fait le même qu'avant."

C'était un part de mon métier.........

 

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